Jockey Club de Paris
Le Jockey Club de Paris est l'un des clubs français les plus huppés et les plus élitistes, sis au 2 rue Rabelais à Paris. Il patronne une course hippique, le prix du Jockey Club, décerné pour la première fois en 1836 à Chantilly.
Forme juridique | Club |
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Fondation | juin 1834 |
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Président | Roland du Luart (depuis 2014) |
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Affiliation européenne |
Cercle royal du Parc Yacht Club royal de Suède |
Affiliation internationale |
Knickerbocker Club Metropolitan Club de Washington D.C. |
Historique
Le Jockey Club est créé en juin 1834 par la Société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux[1], qui organisa, dès , les premières courses à Chantilly. Il porta alors le nom de Cercle d'encouragement avant de prendre son nom actuel.
Le club connut plusieurs adresses : 2 rue du Helder, 2 rue Drouot, 30 rue de Gramont, 1 rue Scribe à partir de 1863, avant de s'installer en 1925 à son adresse actuelle. Les initiateurs de cette Société d'encouragement furent : le duc de Guiche, lord Henry Seymour Conway, le comte de Cambis, le comte Demidoff, M. Ernest Leroy, M. Jules Fasquel, M. Charles Laffitte, le chevalier Machado, le prince de la Moskowa, M. Joseph Rieussec, M. Maxime Caccia, le comte Delamarre, M. Anne-Édouard Denormandie[2],[3]. Par la suite des amis s'adjoindront aux réunions de cette société[2].
Frédéric Rouvillois, auteur de l'ouvrage Histoire du snobisme, rappelle que ce club a été créé au XIXe siècle dans une période d'anglomanie exacerbée[4].
Très vite le Jockey Club s'octroie une sorte de brevet de bon ton et surtout d'exclusivisme : « un beau nom, une existence brillante, le goût des chevaux et de la dépense assurent l'admission au Jockey », écrit en 1864 Charles Yriarte, le premier historien du cercle. À l'époque s'y retrouvent tous les principaux noms de la noblesse française, ainsi que quelques représentants des noblesses étrangères[5] et de la bourgeoisie française ou d'origine étrangère.
Marcel Proust cite le Jockey Club à de nombreuses reprises comme le cercle le plus fermé du monde, le sanctuaire de l'élite ou encore le monde de l'entre-soi[6].
Parmi ses 1 150 membres actuels, on compte des membres de la noblesse et de la bourgeoisie.
« Ni les hommes d'affaires ni les intellectuels n'y ont leur place, s'ils se contentent d'être l'un ou l'autre. […] Aujourd'hui encore, tous les membres du cercle ont des manières de vivre identiques. Le snobisme de l'argent discret est de règle et posséder un château relève de la tradition familiale[5]. »
Malgré la présence de membres d'ascendance noble, le Jockey Club se défend d'être une annexe de l'ANF[7] car ce club n'est pas réservé à la noblesse.
En 1930, Charles de Noailles en démissionne, alors que son exclusion est évoquée après le scandale provoqué par le film L'Âge d'or de Luis Buñuel, qu'il a financé[8].
En 1954, Charondas dans son ouvrage Un juge d'armes au Jockey-club, distingue les familles selon leur origine : noblesse ou bourgeoisie[9]. Il écrit qu'avant l'échec de la Restauration monarchique au XIXe siècle « le cercle était ouvert aux grands notables et aux personnalités importantes, même de famille modeste[9]. » Il écrit également :
« Si les temps ont changé, si le Jockey-Club n'a plus de nos jours la même célébrité et le même éclat qu'il y a deux ou trois générations, il retient encore souvent l'attention de l'opinion […][9]. »
Sur le Jockey Club, Cyril Grange écrit : « Il n'est pas sûr aujourd'hui que l'échelle de valeurs qui mettrait au sommet de la hiérarchie le Jockey-Club et en dernière position l'association la moins aristocratique remporterait tous les suffrages mondains[10]. »
Éric Mension-Rigau écrit quant à lui que le Jockey Club est un des derniers bastions où prévaut la distinction de la naissance et qu'il symbolise la résistance de la noblesse à sa dissolution dans la masse et à son assimilation aux riches. Ce club est selon lui le plus élitiste de tous les cercles, loin devant ses deux principaux concurrents, l'Interallié et l'Automobile Club de France, dont les portes finissent toujours par s'ouvrir à celui qui a beaucoup d'argent. Il cite notamment une femme issue de la noblesse :
« Le Jockey Club est un cercle où n'importe qui ne peut pas être élu. Des critères sont respectés. À l'Interallié on peut tous y aller, si on a deux parrains et de quoi payer. C'est très ouvert, ce qui n'est pas le cas du Jockey Club, où il faut être acceptable avant même d'avoir des parrains[5]. »
Organisation
La direction du club est exercée par un comité, composé d'un président, de quatre vice-présidents et de vingt-cinq membres, et par un sous-comité. Le comité est réélu tous les ans.
Admission
Pour être admis, les candidats doivent être présentés par deux parrains membres de l'Association[11], soumettre leur candidature au vote des membres et atteindre une majorité des cinq-sixièmes.
Les droits d'admission sont de 575 € avec une cotisation annuelle de 1 175 €[12].
Nombre de familles représentées au sein de ce cercle
- Au , 694 familles étaient représentées dont : 524 de noblesse francisée, 104 bourgeoises, 24 de noblesse étrangère notoire, 45 familles étrangères autres[9].
- Au , 644 familles étaient représentées dont : 494 de noblesse francisée, 106 bourgeoises, 18 de noblesse étrangère notoire, 26 familles étrangères autres[9].
- La catégorie Noblesse francisée regroupe la noblesse française et la noblesse française d'origine étrangère[9].
- La catégorie Bourgeoisie regroupe les familles bourgeoises, la fausse noblesse, la noblesse dite inachevée, la noblesse pontificale (non reconnue en France)[9].
Présidents
- 1834-1835 : Lord Henry Seymour Conway (fondateur)[13]
- 1835-1836 : Édouard Denormandie[14]
- 1836-1849 : Napoléon Joseph Ney, prince de la Moskowa
- 1849-1853 : comte Achille Joseph Delamare
- 1853-1884 : Henri II de Gontaut, marquis de Biron
- 1884-1908 : Sosthènes II de La Rochefoucauld, 3e duc de Doudeauville
- 1908-1913 : Philippe de Montesquiou-Fezensac, duc de Fezensac
- 1914-1917 : Élie de Bésiade, comte d'Avaray
- 1919-1962 : Armand de La Rochefoucauld, 5e duc de Doudeauville[15]
- 1962-1977 : Philippe d'Albert, duc de Luynes
- 1977-1985 : Pierre de Cossé, duc de Brissac
- 1985-1997 : Alexandre de La Rochefoucauld, duc d'Estissac
- 1997-2014 : François-Eugène de Cossé, duc de Brissac
- Depuis 2014 : Roland du Luart, marquis du Luart
Notes et références
- Société fondée le 11 novembre 1833 à l'issue d'un rapport d'Adolphe Thiers qui a la volonté de rétablir la balance commerciale française dans ce domaine, la France important ses meilleurs chevaux de Prusse et d'Angleterre. Cette société sélectionnera par la compétition sportive les meilleurs pur-sang et jument pour créer la race française et améliorer les races secondaires. Source : Nicole de Blomac, L'Arabe, premier cheval de sang, Crépin-Leblond, 1978, p. 194-200.
- Les cercles de Paris, 1828-1864, page 70.
- Joseph-Antoine Roy, Histoire du Jockey Club de Paris, Rivière, 1958, 154 p.
- Histoire du snobisme.
- Eric Mension-Rigau, Singulière noblesse, p. 314-320.
- Par exemple :
« L'idée d'un art populaire comme d'un art patriotique, si même elle n'avait pas été dangereuse, me semblait ridicule. S'il s'agissait de le rendre accessible au peuple, on sacrifiait les raffinements de la forme “bons pour des oisifs” ; or, j'avais assez fréquenté de gens du monde pour savoir que ce sont eux les véritables illettrés, et non les ouvriers électriciens. À cet égard, un art, populaire par la forme, eût été destiné plutôt aux membres du Jockey qu'à ceux de la Confédération générale du travail ; quant aux sujets, les romans populaires enivrent autant les gens du peuple que les enfants ces livres qui sont écrits pour eux. On cherche à se dépayser en lisant, et les ouvriers sont aussi curieux des princes que les princes des ouvriers. »
— Marcel Proust, Le Temps retrouvé, 1927, p. 38 [édition folio]
- « Non l'argent n'ouvre pas toutes les portes », L'Express-L'Expansion, (lire en ligne).
- Julien Nenault, « Les folles nuits des Noailles », Vanity Fair n° 9, mars 2014, p. 200-209.
- Charondas, Un juge d'armes au Jockey-Club, ICC, 2000.
- Cyril Grange, Les Gens du Bottin Mondain 1903-1987 Y être, c'est en être, 1996, p. 346.
- « Ballottage au Jockey Club », Le Figaro.fr, 29 avril 2010.
- Le Figaro Magazine n°20 449 du vendredi 30 avril 2010.
- Fils naturel du comte Casimir de Montrond (1869-1843), Henry Seymour Conway (1805-1859) confondu à tort avec Charles de La Battut, dit Milord l'Arsouille (1806-1835).
- Anne-Édouard Denormandie (1796-1855), agent de change, cofondateur du Jockey-Club.
- Armand François Jules Marie de La Rochefoucauld (1870–1963), 5e duc de Doudeauville; duc d'Estrées, Président du Polo de Paris. Conseiller général de la Sarthe. Marié avec la princesse Lise Radziwill (1877-1942).
Voir aussi
Bibliographie
- J.-A. Roy, Histoire du Jockey-Club de Paris, Paris, Marcel Rivière, 1958
- Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, Les Ghettos du Gotha, Seuil, 2007
- Gilles de Chaudenay, Physiologie du Jockey-Club, Del Duca, 1958
- Gibert (A.) et Massa (Ph. de), Historique du Jockey-Club français, Jouaust, 1893
- Duc de Brissac, Le Château d'en face, Paris, Grasset, 1986
- Charondas, Un juge d'armes au Jockey-club, Les Cahiers nobles 1954, réédition ICC 2000
- Dominique de Lastours, Histoire du 2 rue Rabelais, le Jockey Club, Éditions Lampsaque, 2017
Article
- « Non, l'argent n'ouvre pas toutes les portes », L'Express-L'Expansion
Articles connexes
- Quelques cercles étrangers affiliés
- Autres clubs élitistes parisiens
- Automobile Club de France (ACF), fondé en 1895
- Club de la chasse et de la nature
- Traveller's Club
Lien externe
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