Scylla (monstre)
Dans la mythologie grecque, Scylla (en grec ancien Σκύλλα / Skúlla) est une nymphe qui fut changée en monstre marin par Circé. Elle est souvent associée à Charybde, près de qui elle réside de part et d'autre d'un détroit traditionnellement identifié avec le détroit de Messine[1]. L'expression « tomber de Charybde en Scylla » signifie de nos jours « éviter un danger en s'exposant à un autre pire encore » ou « aller de mal en pis ». La fougue d'Ulysse le mène à tenter de harponner Scylla depuis le gaillard de son navire. Tout comme les Cyclopes sont une allusion aux volcans des îles italo-siciliennes, il faut y voir une image de la pêche au harpon, qui se pratique dans les parages à son époque et encore de nos jours[2].


Mythe
Les traditions divergent beaucoup quant à sa parenté : chez Homère, Scylla est une Phorcyde, fille de Phorcys et de Crataïs[3] ; d'autres auteurs lui prêtent diversement Céto pour mère, Apollon pour père, ou la font naître de Typhon et d'Échidna, ou encore de Pallas et de Styx, voire de Lamia ou d'Hécate.
D'une grande beauté, elle vivait parmi les Néréides. Le dieu Glaucos s'éprit d'elle, mais elle le repoussa ; il s'adressa alors à la magicienne Circé pour lui demander de fabriquer un philtre d'amour. Celle-ci, amoureuse du dieu et jalouse de sa rivale, mit au point un poison que Glaucos versa lui-même dans la fontaine où Scylla avait l'habitude de se baigner : la nymphe se changea alors en un monstre hideux ayant douze moignons pour pieds et six long cous ayant chacun une tête et une triple rangée de dents, ou un monstre hideux entouré de chiens hurlants et de serpents. Voyant sa métamorphose, Scylla se précipita dans la mer, où elle terrorise depuis les marins.

Rapporté dans les Métamorphoses d'Ovide, ce mythe a aussi inspiré la tragédie lyrique de Jean-Marie Leclair, Scylla et Glaucus (1746).
On retrouve Charybde et Scylla dans plusieurs légendes, et notamment celle des Argonautes, qui parviennent à passer sans encombre entre les deux monstres, sous la protection d'Héra ; celle d'Ulysse, qui voit six hommes de son équipage se faire dévorer — Ulysse repasse plus tard devant Scylla, mais cette dernière n'avait pas vu Ulysse — et Héraclès qui, rapportant les bœufs de Géryon en Grèce, en perd aussi une partie.
Démythification
Selon les Histoires incroyables de Palaiphatos, Scylla était le nom d'une célèbre trirème tyrrhénienne qui attaquait les bateaux, et à laquelle Ulysse échappa[4].
Réinterprétation philosophique
Depuis l'Antiquité, Scylla a bénéficié de nombreuses interprétations philosophiques, parfois alchimiques, à la fois païennes et chrétiennes, entre autres chez Héraclide du Pont, Eustathe et Christophe Contoléon[5]. Au XXe siècle, le philosophe d'Hooghvorst en propose lui aussi un commentaire détaillé : « Là se lit le néant des âges, là un gel infernal substitue le rêve à toute joie[6]. »
Culture populaire
- Dans le jeu vidéo God of War: Ghost of Sparta, le joueur (incarnant le personnage de Kratos) combat et tue Scylla aux abords de l'Atlantide.
- Dans l'univers de Saint Seiya, dans le domaine de Poséidon, Shun affronte Io de Scylla utilisant des attaques représentant les six têtes aux pieds de Scylla.
- On retrouve aussi Scylla dans la saga de Percy Jackson (La Mer des monstres) où Percy, Tyson, Clarisse et Annabeth essaient de traverser Scylla, ils réussirent mais perdirent leur navire
Notes et références
Notes
- Thucydide, La Guerre du Péloponnèse [détail des éditions] [lire en ligne], IV, 24.
- Strabon, Géographie [détail des éditions] [lire en ligne], I, 2, 15-16.
- Homère, Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne], XII, 124-126.
- Palaiphatos, Histoires incroyables [détail des éditions] (lire en ligne)
- H. van Kasteel, Questions homériques, Physique et Métaphysique chez Homère, Grez-Doiceau, , LXVIII + 1200 p. (ISBN 978-2-9600575-6-0), p. 164, 625-627, 740-741, 765, 814.
- Cité dans : H. van Kasteel, op. cit., p. 1054.
Sources
- Platon, La République [détail des éditions] [lire en ligne] (Livre IX, 588c).
- Homère, Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne] (Chant).
- Hygin, Fables [détail des éditions] [(la) lire en ligne] (Préface).
- Ovide, Métamorphoses [détail des éditions] [lire en ligne] (VII, 62 ; VIII, 6 ; XIII, 900 ; XIV, 74).
- Pausanias, Description de la Grèce [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 19, 4).
- Virgile, Géorgiques [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 404).
Voir aussi
Bibliographie
- Michael Grant et John Hazel (trad. Etienne Leyris), Dictionnaire de la mythologie [« Who’s Who in classical mythology »], Paris, Marabout, coll. « Savoirs », (ISBN 2-501-00869-3), p. 321
- Homère (trad. du grec ancien par Victor Bérard), L’Odyssée, Éditions Gallimard, (1re éd. 1956) (ISBN 2-07-010261-0), p. 714
- Edith Hamilton (trad. Abeth de Beughem), La Mythologie, éd. Marabout, (ISBN 9782501002646), p. 259-260
- Luc Brisson (dir.), Définitions, Éditions Gallimard, (1re éd. 2006) (ISBN 978-2-0812-1810-9)
Articles connexes
- Charybde
- Charybde et Scylla
- (155) Scylla, astéroïde nommé en hommage
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