Marine austro-hongroise
La Marine austro-hongroise était la marine militaire de l'Empire austro-hongrois. Son nom officiel était en allemand kaiserliche und königliche Kriegsmarine (Marine de guerre impériale et royale) aussi connue par son acronyme K.u.k.K..
Kaiserliche und königliche Kriegsmarine | |
![]() Pavillon de la k.u.k.K. | |
Création | 1869 |
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Dissolution | 1918 |
Pays | Autriche-Hongrie |
Type | Marine de guerre |
Effectif | 1 915 : 33 735 |
Fait partie de | Armée austro-hongroise |
Surnom | k.u.k. Kriegsmarine |
Guerres | Première Guerre mondiale |
Cette marine a pris ce nom pendant la période allant de la formation de la double monarchie en 1867 jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale en 1918. Avant 1867, les forces navales du pays sont celles de l'Empire autrichien.
Après la Première Guerre mondiale, l'Autriche et la Hongrie deviennent des pays enclavés et leurs anciennes marines ont été confisquées. Leurs anciens ports de la mer Adriatique, comme Trieste, Pola, Fiume et Raguse, sont devenus parties de l'Italie et de la Yougoslavie.
Les navires de la K.u.k. Kriegsmarine ont été désignés par le préfixe SMS, pour Seiner Majestät Schiff (Navire de Sa Majesté).
Historique
La marine autrichienne
Jusqu'en 1848 la marine autrichienne, assez modeste encore, était aux mains d'officiers surtout vénitiens, Venise étant alors possession autrichienne. Les mouvements révolutionnaires de 1848-49 voient une grande partie de la flotte hisser le drapeau italien[1]. Après la reddition de Venise, le corps des officiers de la marine est progressivement germanisé et la principale base est transférée à Pola. L'archiduc Ferdinand-Maximilien qui en assure la direction, peut renforcer la flotte. La flotte comprend 7 cuirassés à coque de bois qui firent merveille à la bataille de Lissa, et 17 navires en bois (un vaisseau, 5 frégates, 2 corvettes et 9 canonnières). Elle fournit parfois des officiers et de la logistique à des expéditions scientifiques civiles comme celle au Brésil en 1817-35, celle autour du monde en 1857-59 et celle dans l'Arctique en 1872-74.
Le compromis austro-hongrois

La « double-monarchie » d'Autriche-Hongrie est un État à dominante terrestre dont les dirigeants ne portent qu'un faible intérêt à la marine. Dans la nouvelle Constitution, la marine est rattachée au ministère de la guerre. Sa mission principale est la protection du littoral austro-hongrois dans la Mer Adriatique (Istrie, Dalmatie, Raguse, Cattaro) et la surveillance du détroit d'Otrante. Après la défaite de 1866, lorsque l'Empire perd Venise, la priorité est donnée au renforcement de l'armée de terre ; la marine a donc la portion congrue en dépit de la forte personnalité de son chef : l'amiral Wilhelm von Tegetthoff. Celui-ci meurt prématurément en 1871 à 43 ans. Il est remplacé par l'amiral von Pöck qui essaie en vain d'obtenir la parité avec la marine italienne. Malade, il démissionne en 1883 et est remplacé par Robert von Sterneck, adepte de la stratégie de la Jeune École qui consiste à développer une flotte de faible tonnage mais nombreuse (augmentation des effectifs de torpilleurs) en adéquation avec son faible budget, insuffisant pour construire assez de cuirassés de gros tonnage pour former une escadre efficace.
Sous la pression d'une partie du Haut Commandement naval, Sterneck se détache de cette doctrine dans les années 1890 et met en chantier des croiseurs cuirassés. Ses successeurs von Spaun et Monteccucoli poursuivent l'effort de construction navale grâce à une hausse significative du budget consacré à la marine, en obtenant l'appui de l'archiduc François-Ferdinand, héritier de la double-monarchie depuis le drame de Mayerling. C'est l'époque où l'État devient pratiquement autonome pour la construction navale (chantiers navals de Trieste et Fiume, Usines Škoda pour l'armement et le blindage). La crise bosniaque de 1908 montre également la nécessité de disposer d'une marine puissante. Commence alors une compétition entre l'Autriche-Hongrie et l'Italie, en dépit de l'adhésion des deux pays à la Triplice. L'association des marines des deux pays, confortée par une flottille allemande, vise à contester le contrôle de la Méditerranée par la Triple-Entente. C'est l'objet de la convention navale de entre l'Italie et l'Autriche-Hongrie[2]. Mais l'accord n'est pas dénué d'arrière-pensées en raison des revendications irrédentistes italiennes sur l'Istrie, la Dalmatie et le Tyrol.
Jusqu'à la Première guerre mondiale, la marine austro-hongroise participe à des opérations internationales menées conjointement par les puissances européennes : autonomie de la Crète en 1896 au sein de l'Empire ottoman ; expédition en Chine pour réprimer la révolte des Boxers en 1900-1901 et blocus maritime du port monténégrin de Bar lors de la Première guerre des Balkans.
La marine à la veille de la Grande Guerre
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Le commandement de cette flotte est complexe, il n'existe pas de ministère de la marine et les questions navales sont du ressort d'une Direction dépendant du ministère de la Guerre. Le chef de la flotte est Anton Haus qui a son quartier-général dans la base navale de Pola, les opérations étant ordonnés par le chef des Armées[3]. Son principal fournisseur est le chantier naval Stabilimento Tecnico Triestino de Trieste.
La marine austro-hongroise reste en 1914 la plus modeste des grands belligérants de la Première Guerre mondiale. Elle dispose de :
- quatre dreadnoughts de la classe Tegetthoff 20 000 tonnes lancé à partir de 1911 dont un en construction (Viribus Unitis, Tegetthoff, Prinz Eugen et Szent István) ; pouvant filer 20 nœuds et armés notamment de 12 canons de 305 mm ;
- trois cuirassés pré-Dreadnought de 14 500 t de la classe Radetzky (Erzherzog Franz-Ferdinand, Radetzky et Zrinyi), lancés entre 1908 et 1910, filant 18 nœuds, armement principal de 4 canons de 305 mm ;
- trois cuirassés pré-Dreadnought de 10 600 t de la classe Erzherzog Karl (Erzherzog Karl, Erzherzog Friedrich et Erzherzog Ferdinand Max) lancés entre 1903 et 1905, armement principal de quatre canons de 270 mm ;
- trois cuirassés pré-Dreadnought de 8 300 t de la classe Habsburg (Habsburg, Arpad et Badenberg) lancés entre 1900 et 1902 sans grande valeur militaire ;
- trois cuirassés de défense côtière de la classe Monarch de 5 800 t lancé entre 1894 et 1895 ;
- un croiseur cuirassé, le SMS Sankt Georg, de 7 200 t lancé en 1903 ;
- un croiseur cuirassé, le SMS Kaiser Karl VI, de 6 100 t lancé en 1898 ;
- un croiseur cuirassé, le SMS Kaiserin und Königin Maria Theresia, de 5 100 t lancé en 1893 ;
- deux croiseurs protégés de la classe Kaiser Franz Joseph I, de 4 000 t. lancé entre 1889 et 1890 ;
- trois croiseurs légers de la classe Novara, de 3 500 t lancé entre 1911 et 1912 ;
- un croiseur léger, le SMS Admiral Spaun, de 3 500 t, lancé en 1909 ;
- 48 torpilleurs et contre-torpilleurs, les destroyers les plus récents étant ceux de la classe Tátra ;
- huit sous-marins.
Son effectif est de 16 000 hommes, en majorité de souche croate, mais représentant la plupart des nationalités de l'Empire, à l'exception des Italiens jugés peu fiables et versés dans l'armée de terre[4].
La Grande Guerre


L'Adriatique est un front mineur dans la Première Guerre mondiale. L'Italie ayant déclaré sa neutralité, la première année de guerre se résume à un face-à-face entre les marines française et austro-hongroise. Cette dernière se dérobe, profitant de la protection que lui offrent les refuges naturels des îles et des côtes dalmates et du port bien protégé de Pola. Elle mène plutôt une guerre de guérilla en utilisant ses sous-marins et la pose de mines[5]. L'Amirauté française se contente alors de bloquer le détroit d'Otrante, blocus auquel se joint l'Italie après son entrée en guerre en aux côtés des alliés. L'inaction de la marine austro-hongroise a été en partie causée par les pénuries de charbon.
En dépit de quelques timides raids menés par la marine italienne et de projets de débarquement alliés sur la côte dalmate, le front Adriatique tombe en léthargie. La libération de la côte dalmate interviendra par l'intérieur des terres par le front de Macédoine et de l’armée d’Orient. Dans les derniers jours de la guerre, les Italiens et les Serbes, alliés mais rivaux sur les dépouilles de l'Empire austro-hongrois, cherchent à prendre des gages.
En 1918, pour éviter de devoir céder sa marine aux vainqueurs, l'empereur d'Autriche-Hongrie donne l'intégralité de la flotte militaire et marchande de la double monarchie avec tous les ports, arsenaux et fortifications côtières, au Conseil du Peuple du nouvel État des Slovènes, Croates et Serbes qui vient de naître à Zagreb[6]. Ils envoient des notes diplomatiques aux gouvernements français, britannique, italien, américain et russe pour indiquer que l'État des SCS n'était en guerre avec aucun d'entre eux et que le Conseil avait pris le contrôle de la flotte austro-hongroise. Malgré tout, le , deux nageurs de combat envoyés depuis un torpilleur italien coulent le cuirassé SMS Viribus Unitis dans le port de Pola[5]. Le reste de la flotte sera démembré par la Regia Marina (la marine royale italienne).
Évolution du budget de la Kriegsmarine
(en millions de couronne autrichienne)[1]

En dépit des efforts financiers, le budget de la marine de l'Autriche-Hongrie à la veille de la Guerre mondiale reste faible par rapport aux autres États européens. Le budget du Royaume-Uni lui est huit fois supérieur ; ceux de la Russie, l'Allemagne et la France le sont quatre à cinq fois ; celui de l'Italie est encore le double[1].
Commandants en chefs de la Marine austro-hongroise (Flottenkommandant)
- Ludwig von Fautz, VAm. (1861-1865)
- Wilhelm von Tegetthoff, VAm. (-)
- Friedrich von Pöck, Am. (-)
- Maximilian Daublebsky von Sterneck (en), Am. (-)
- Hermann von Spaun (en), Am. (-)
- Rudolf Montecuccoli, Am. (-)
- Anton Haus, Am./GAm. (-)
- Maximilian Njegovan (en), Am. (-)
- Miklós Horthy, KAm./VAm. (-)
- Amiral Tegetthoff.
- Amiral Spaun.
- Amiral Haus.
- Amiral Horthy.
- Amiral Njegovan.
Chefs de la section navale (Chef der Marinesektion)
- Ludwig von Fautz, VAm. (-)
- Wilhelm von Tegetthoff, VAm. (-)
- Friedrich von Pöck, Am. (-)
- Maximilian Daublebsky von Sterneck, Adm. (-)
- Hermann von Spaun, Am. (-)
- Rudolf Montecuccoli, Am. (-)
- Anton Haus, Am./GAm. (-)
- Karl Kailer von Kaltenfels, VAm. (-)
- Maximilian Njegovan, Am. (-)
- Franz von Holub, VAm. (-)
Principaux engagements
- Bataille de Heligoland (1864)
- Bataille de Lissa (1866)
- Révolte des Boxers - 1900
- Combat d'Antivari - 1914
- Barrage d'Otrante - 1915/1918
- Bataille du détroit d'Otrante - 1917
- „SMS” Viribus Unitis (Hommes Unis), navire amiral.
- „SMS” Großherzog Karl (Archiduc Charles).
- Naufrage du „SMS” Szent-István (St.Étienne).
- „SMS” Tegetthoff.
- „SMS” Radetzky.
- „SMS” Sankt-Georg (St.Georges).
- „SMS” Streiter.
- „SMS” Tátra.
- „SMS” Zenta.
Notes et références
- Pierre Iltis, La Marine austro-hongroise, bimestriel Champs de Bataille, no 55, mai 2014, p. 62-83
- Pierre Iltis, La situation navale à l'orée de la Première Guerre mondiale, bimestriel Champs de Bataille thématique, no 36, juin 2014, p. 82
- Paul Chack et Jean-Jacques Antier, Histoire maritime de la première guerre mondiale, vol. 2, Editions France-Empire, , 491 p., p. 339
- Louis Klein, L'encyclopédie de la Grande Guerre, E/P/A Editions, , (ISBN 978-2851207043)
- « L’Adriatique, les enjeux d’un front secondaire », Cahiers de la Mediterrannée, no 81, , p. 63-73 (lire en ligne)
- Jean-Paul Bled, L'agonie d'une monarchie. Autriche-Hongrie 1914-1920, Tallandier, 2014, p. 419
Annexes
Articles connexes
Bibliographie
- Commandant Hans Hugo Sokol, La Marine austro-hongroise dans la guerre mondiale 1914-1918, Paris, Payot 1933, (215 p.)
- (de) Walter Wagner, Die obersten Behörden der K. und k. Kriegsmarine, 1856-1918, Vienne 1961
Liens externes
- (en) The Genesis of the Austrian Navy - A Chronology
- (de) K.u.K. Kriegsmarine - Insignes des officiers de la marine austro-hongroise
- (fr) Iconographie de la flotte
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