Norilsk

Norilsk (en russe Норильск) est une ville industrielle du kraï de Krasnoïarsk, en Russie. Sa population s'élevait à 176 251 habitants en 2015. Située au nord du cercle polaire arctique, elle est considérée comme la ville de plus de 100 000 habitants la plus septentrionale du monde — mais aussi comptant parmi les plus polluées[1]. Lieu de détention[2], Norilsk a été fondée parallèlement au Norillag, une branche du Goulag. Elle ne peut être atteinte que par avion ou par bateau, en été, par le fleuve Ienisseï. Une voie de chemin de fer de 80 km relie Norilsk au port de Doudinka, sur l'Ienisseï.

Norilsk
(ru) Норильск

Héraldique

Avenue du centre-ville.
Administration
Pays Russie
Région économique Sibérie de l'Est
District fédéral Sibérien
Sujet fédéral Kraï de Krasnoïarsk
Maire Oleg Kourilov
Code postal 663300 — 663341
Code OKATO 04 429
Indicatif (+7) 3919
Démographie
Population 176 251 hab. (2015)
Densité 39 hab./km2
Géographie
Coordonnées 69° 21′ nord, 88° 12′ est
Altitude Min. 350 m
Max. 370 m
Superficie 451 964 ha = 4 519,64 km2
Fuseau horaire UTC+08:00 (IRKT)
Divers
Fondation 1935
Statut Ville depuis 1953
Localisation
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Norilsk
Liens
Site web norilsk.net
Sources

    Histoire

    Période pré-stalinienne

    Première maison en rondins de bois construite à Norilsk

    La ville industrielle de Norilsk doit son existence au géologue Nikolaï Ourvantsev qui, au début des années 1920, découvre de riches gisements de cuivre, de nickel et de platine au nord du plateau de Poutorana. Il trouve également des traces de campements de « métallurgistes » qui remontent à plus de 6 000 ans[1]. Il décide d'y construire une isba, maison de rondins de bois, la première habitation de ce qui va devenir Norilsk[1].

    Période stalinienne

    Dans les années 1930, la décision de bâtir cette ville-usine fut prise par Staline afin d'exploiter les minerais non ferreux de la région, en particulier pour l'industrie de guerre et afin d'investir le Grand Nord russe. Staline signe en 1935 le décret secret qui fonde le goulag de Norilsk sous le nom de Norillag[1].

    Pendant les vingt années suivantes, 500 000 prisonniers (dont le Français Jacques Rossi[1]), vivant dans des conditions extrêmes de froid et de faim, sont contraints d'extraire les matières premières de la région, comme le nickel, le cuivre, le cobalt et le charbon et d'édifier la ville, que Staline voulait aussi belle que Leningrad[3]. Des dizaines de milliers de déportés y meurent. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les minerais extraits par les prisonniers servent à alimenter l'industrie de guerre soviétique. Norilsk est alors une ville secrète[4].

    Norilsk accède au statut de commune urbaine en 1939 et à celui de ville en 1953.

    Période post-stalinienne

    À la mort de Staline, en 1953, le pouvoir soviétique renonce au travail forcé, après avoir réprimé dans le sang les révoltes de déportés qui protestaient contre la dureté du système[1].

    Norilsk, gérée jusqu'en 1956 comme un goulag, devient alors une municipalité, même si elle reste une ville interdite. Comme l'URSS a démantelé le camp, ses dirigeants doivent trouver un moyen de remplacer les zeks (prisonniers soviétiques) qui exploitaient les richesses du sous-sol. Les autorités optent pour un système toujours basé sur la main-d'œuvre, plutôt que d'investir dans la modernisation et l'automatisation. Afin d'attirer des travailleurs volontaires dans cette région peu attractive, on propose des salaires beaucoup plus élevés que dans le reste du pays et des avantages en nature (billets d'avion gratuits, vacances plus longues...). De plus, les infrastructures offertes sont de bien meilleure qualité qu'ailleurs dans le pays, que ce soient des hôpitaux modernes, des garderies gratuites pour les enfants des travailleurs et des transports plus efficaces et fiables[1].

    Après l'effondrement de l'URSS, au début des années 1990, le vieux combinat devient l'entreprise Norilsk Nickel, premier producteur mondial de nickel et de palladium.

    Au XXIe siècle, la logique n'est plus d'y fixer les populations, et l'entreprise principale, Norilsk Nickel, a surtout recours à des travailleurs temporaires. Aussi la population de la ville a fortement diminué depuis la dislocation de l'Union soviétique. En 2005, la ville de Norilsk s'est agrandie en annexant trois villes-satellites :

    • Talnakh (en russe Талнах) : située à 25 km au nord de Norilsk, elle comptait 58 654 habitants en 2002 ; le gisement de nickel-cuivre-palladium de Norilsk-Talnakh est le plus grand du monde ;
    • Kaïerkan (Кайеркан) : située à 20 km à l'ouest de Norilsk, 27 100 habitants en 2002 ;
    • Snejnogorsk (Снежногорск).

    Cette extension a fait bondir le chiffre de la population de Norilsk de 132 000 à 213 000 habitants, sans ralentir le déclin démographique de la ville, dans ses nouvelles limites administratives.

    Ayant encore le statut de ville fermée, Norilsk est d'accès réglementé.

    Économie

    Économie urbaine, nationale et mondiale

    Le théâtre dramatique Maïakovski de Norilsk.

    L'extraction du nickel, du cuivre, du cobalt et du charbon, la métallurgie et les centrales thermiques et hydroélectriques, constituent l'activité de la ville. Mais c'est surtout l'extraction d'une mine de nickel, qui est l'une des plus importantes de la ville. Son complexe sidérurgique et minier est le plus important de la planète[1].

    Aujourd'hui, l'entreprise Norilsk Nickel pèse 17 % sur la production de nickel et 41 % sur le palladium de la production mondiale totale, ce qui représente près de 2 % du PIB russe.

    Complexe sidérurgique et minier

    Aujourd'hui, les minerais proviennent de six mines souterraines dont la profondeur varie de -450 à −2 050 mètres et dont l'ensemble des galeries représentent un réseau de 800 km de long.

    Situé à 12 km du centre-ville, le combinat est en activité nuit et jour, 365 jours par an, quelles que soient les conditions climatiques.

    Environnement

    Chaque année, plus de 2 millions de tonnes de gaz sont rejetés dans l'atmosphère (dont 98 % de dioxyde de soufre, mais aussi d'oxyde d'azote, de carbone et de phénols) par les usines de Norilsk. La ville et son complexe industriel polluent autant que la France entière[1]. C'est pourquoi Norilsk est considérée comme la 7e cité la plus polluée du monde, en 2015 [5].

    Écosystème

    100 000 hectares de toundra, sur un rayon de 30 km autour de la ville, sont brûlés par les pluies acides et les émanations toxiques. L'herbe y pousse très peu et les arbres sont desséchés. Les poisons industriels s'insinuent partout. En été, quantités de baies sauvages (mûres, myrtilles, cassis, groseilles...) et de champignons poussent, mais sont chargés en métaux lourds. Les habitants sont contraints de les nettoyer pour qu'ils ne soient plus nocifs[1].

    Contrairement aux bâtiments du centre-ville dits « maisons de Staline » et de meilleure qualité, les immeubles récents ont été construits directement sur le permafrost (pergélisol), gelé depuis des siècles. Mais le mauvais état des conduites d'eau chaude et du chauffage urbain qui fuient, provoque la fonte progressive du sol. Cela entraîne un affaissement de nombreuses constructions et une libération de méthane (gaz mortel s'il est présent en grande quantité dans l'atmosphère)[1].

    Santé publique

    La pollution a des effets en matière de santé publique : la population souffre plus d'affections respiratoires ou dermatologiques (eczéma du nickel), en particulier les enfants, au point que l'espérance de vie y est d'à peine 60 ans[1], dix ans de moins que la moyenne nationale de 70 ans.

    Urbanisme

    Sécurité

    La ville a été conçue pour protéger ses habitants des rigueurs du climat. Les passages étroits entre les bâtiments font office de refuges en cas de blizzard. Les inscriptions des numéros sur les immeubles sont surdimensionnées pour faciliter le repérage en cas de tempêtes[1].

    Dégradation

    En 2015, 7 % des immeubles de la ville sont insalubres, et certains s'émiettent, mais près de 1 200 familles y vivent toujours[1].

    Population

    Recensements (*) ou estimations de la population [6] :

    Évolution démographique
    1939 1959 1962 1967 1970 1974 1975 1979 1982 1985
    13 886109 442117 000129 000135 487156 000167 000180 358183 000185 000
    1986 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997
    181 000174 673178 000174 000171 000172 000169 000164 000161 000160 000
    1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007
    156 000152 000146 000143 100134 832134 800133 000131 900213 200[7]209 000
    2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 -
    206 000203 930175 365175 400177 273177 738176 559176 251--

    Climat

    Diagramme climatique de Norilsk

    En hiver, les températures peuvent tomber jusqu'à −50 °C et les rafales de vents peuvent atteindre 100 km/h. Il tombe l'équivalent de 2 millions de tonnes de neige par an, soit 10 tonnes par personne.

    En été, les températures peuvent atteindre entre 20 et 30 °C.

    • Nombre moyen de jours avec de la neige dans l'année : 250 à 270.
    • Nombre moyen de jours avec tempête de neige dans l'année : 130.
    Relevé météorologique de Norilsk
    Mois jan. fév. mars avril mai juin jui. août sep. oct. nov. déc. année
    Température minimale moyenne (°C) −30,7 −31 −26,4 −18,5 −8,4 3,4 10 7,6 1,2 −12,5 −23,9 −28,9 −13,4
    Température moyenne (°C) −26,9 −27,2 −21,9 −13,9 −4,8 7 14,3 11,4 4 −9,5 −20,2 −25,1 −9,6
    Température maximale moyenne (°C) −23,6 −23,9 −18,4 −10 −1,7 10,4 18,2 15 6,9 −6,7 −16,9 −21,6 −6,2
    Record de froid (°C) −53,1 −52 −46,1 −38,7 −26,8 −9,8 0,4 −1 −14 −36 −43,1 −51 −53,1
    Record de chaleur (°C) −3 −2 7,4 10,5 22,8 30,4 31 28,7 18,6 9,6 3,1 −1 31
    Précipitations (mm) 17,6 16,1 28,4 21,1 24 34,4 32,4 52,2 26 35,9 30,8 22,1 341

    Les nuits polaires durent de novembre à mi-janvier. Tandis que pendant les deux mois d'été, le soleil ne se couche pas.

    Comme dans les autres pays nordiques, la latitude élevée de Norilsk engendre une importante différence de lumière de jour entre l'hiver et l'été.

    Les journées sont plus courtes au solstice d'hiver :

    Durée moyenne d'une journée en fonction du mois
    Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre Année
    Nombre d'heures 2 8,6 12,8 18 23,2 24 23,2 20 14,3 10 5 2 13,6

    Culture

    Jeunesse

    Une fois par mois les jeunes de la ville se réunissent à la discothèque « Mekhanika ». C'est la seule opportunité, pour eux, de se rencontrer et de danser sur de la musique moderne.

    Religion

    Fin janvier, les habitants ont pour coutume de célébrer l'Épiphanie orthodoxe par un bain des fidèles dans le lac de Norilsk. Une tradition qui réunit de nombreux habitants.

    Fuseau horaire

    Norilsk est réglé à l'heure de Krasnoïarsk. Par rapport à Moscou, Norilsk a 4 heures de plus. Cela correspond à UTC+7 dans le monde, par rapport au méridien de référence.

    Politique

    Maire de la ville

    Structures des organes municipaux de la ville

    Conseil des députés de Norilsk

    Début du mandat : 4 mars 2012. Durée du mandat : 5 ans. Président : Oleg Kourilov

    Maire de Norilsk

    Début du mandat : 20 mars 2012. Durée du mandat : 5 ans. Président : Oleg Kourilov

    Administrateur de Norilsk

    Administrateur : Posdniakov Evgueniï. Nommé le 4 février 2014. Durée du mandat : se base sur la durée du mandat du conseil des députés.

    Transports

    Transports nationaux

    Aéroport de Norilsk

    Aucune autoroute ne parvient à Norilsk. La ville n'est accessible que par voie aérienne ou maritime par le fleuve Ienisseï puis par voie ferroviaire sur 80 km à partir du port de Doudinka. L'aéroport de Norilsk, Alykel Norilsk (code AITA : NSK), se situe à 40 km de la ville.


    Voir aussi

    Notes et références

    1. François Marot, « Norilsk, ville extrême », Le Figaro Magazine, semaine du 13 mars 2015, pages 44-53.
    2. Alexandre Soljenitsyne 1972, p. 440, note 1
    3. Le goulag oublié, documentaire d'Emmanuel Amara.
    4. Le Manuel du Goulag, publié en 1997, en France, au Cherche-Midi, par Jacques Rossi.
    5. (en) « Article du Blacksmith Institute sur Norilsk » (consulté le 6 juillet 2008)
    6. (ru) Recensements de 1959, 1970 et 1979 sur www.webgeo.ru — Résultats préliminaires du recensement du 14 octobre 2010
    7. En incluant les trois villes-satellites annexées en 2004.

    Bibliographie

    Liens externes

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